hapelois d'antan...


Robert SIOZARD nous a quittés en février 2010
à l'âge de 88 ans.



           Nous sommes réunis ce jour dans cette église de La Chapelle Gonaguet, pour rendre un dernier hommage à celui qui a été le papa, le pépé, l'arrière grand-père, l'oncle, l'ami, un voisin, voire un collègue de travail d'un de ceux qui se trouvent ici dans le recueillement.

           Pour mon épouse, Geneviève, comme pour moi-même, Robert était notre unique Tonton, oui le seul, que nous avons connu parce qu'on l'aimait. Mon tonton m'avait raconté beaucoup de choses sur son existence et j'éprouvais un énorme plaisir à l'écouter. Je ne peux résumer sa vie en quelques mots, mais l'élan est donné ne serait-ce que par son exemple, celui qu'il nous a laissé. Né le 19 avril 1922 à La Chapelle Gonaguet, c'était un authentique habitant de ce hameau des Reyssoux, qu'il appelait au détour d'une balade "sa capitale". Mon tonton Robert a fréquenté l'école du bourg où il a passé, en 1936 et avec succès, son Certificat d'Etudes Primaire (voir en fond de page). Il avait eu le plaisir de me montrer ses cahiers de devoirs, les difficiles sujets de mathématiques de cette époque, qui font qu'aujourd'hui, un bachelier aurait sans doute du mal à résoudre. Oui, Tonton, tu m'as souvent évoqué la sévérité de ton instituteur, son impressionnante pédagogie, quelques fois frappante, sans oublier les quelques coups de pied au derrière qui sont restés gravés dans ta mémoire.

           La vie ne t'a pas gâté. Tes parents te racontaient souvent avant ta naissance, le passage des trains à la barrière des Reyssoux, bondé de soldats blessés et mutilés qui rentraient du front de la 1ère guerre. Ah cette guerre ! Il a bien fallu que tu fasses la deuxième, toi qui étais avant tout, un homme de paix.

           Tu te maries ensuite avec Irène, d'où naît André de cette union. Le reste de ta vie tu l'as consacré au travail - celui de la terre et celui de cheminot -. Tu as été on le sait, un ouvrier exemplaire, qui n'hésitait pas à se rendre au boulot à pied, jusqu'à Charniers, quand ta moto ne pouvait pas rouler sur la neige tombée au cours de la nuit. Le Travail pour loi, l'honneur comme guide, constituent, mon cher Tonton, les deux valeurs que tu as su toujours incarner.

           Tu aimais la vie, le travail, les vieux métiers, autrement dit "vivre au pays". D'ailleurs cette vie du pays, tu savais mieux que tous l'incarner en parlant notre patois et en portant continuellement sur ta tête ce béret noir, symbole de la Gascogne, comme tu savais si bien nous dire...

           Oui, mon cher Tonton, j'ai passé des moments inoubliables auprès de toi. Les vendanges d'antan aux Serventies, puis ensuite sur le plateau des Plâtreries, la fête du cochon, l'abattage des canards, tous ces rituels de cette vie rurale réveillent en moi mille souvenirs, sans oublier la récolte de la mounjette, donc tu étais un inrassasiable consommateur. C'est vrai, mon cher Tonton, que ta soupe de haricots avec son chabrol constituaient un rituel qui t'était familier, voire indispensable pour reprendre avec ardeur le travail. Tout cela c'est bien fini. Fini de goûter le bacco le jour de la fête du bourg, fini d'entendre tes éclats de rire, fini le petit vin de noah qu'il a fallu arracher dans la douleur, fini de trinquer avec un verre de pineau au nom de notre amitié et de nos liens familiaux.

           Oui, mon cher Tonton, plus que personne tu étais attaché aux valeur de la terre, à celle qui t'a nourri sainement et qui t'a permis d'élever ta petite famille.            Et puis il y avait les bons moments de la vie, les repas de fête, dont celle de ton village. Et lorsque l'accordéon enchaînait quelques notes, tu n'étais pas le dernier à tourner la valse.

           Mon cher Tonton, nous sommes réunis ce jour avec ta famille et tes amis, pour te faire un dernier adieu. Qui pourra oublier ton esprit jovial, ta simplicité, tes mots comme "finissez d'entrer", ton petit vin rouge qui scellait tant de retrouvailles ? Aujourd'hui une page se tourne et je pense à cette vie rurale que tu as vécue, à cette roue qui pousse inexorablement les journées, à ces souvenirs qui incarnent un passé et que j'ai essayé, en toute simplicité de retracer.

           Oui, Tonton, tu étais notre référence, notre patrimoine vivant, une sorte de carte postale qui incarnait la France profonde, celle du bon vieux temps celle des traditions qui savaient nous rassembler. Tu nous as quittés discrètement le 20 février au petit matin, plongeant ton fils André qui te veillait et tes amis dans une immense et indescriptible douleur. Tu es parti loin, certainement vers d'autres rivages, pour abréger ton chapitre de souffrances et d'agonie vécu sur ton lit de la clinique Francheville. Tu n'as plus eu la force de te battre contre cette sale maladie qui te rongeait depuis quelques temps déjà. Et comme tu n'étais que douceur et gentillesse, il a fallu que cette fin de vie te fasse tant de mal, pour en arriver là ! Cette vie qui dans bien des domaines s'est acharnée contre toi ces dernières semaines, qui a fini par avoir raison de ton âme et de ton cœur, qui eux n'ont pu résister.

           J'espère, mon cher Tonton, que tu as enfin trouvé dans ton repos éternel de la sérénité. J'ai simplement envie de te redire que tu manques et que tu nous manqueras à tous, jusqu'au jour où nous viendrons te rejoindre. En attendant, essaie, de là-haut, de te pencher sur nous de temps en temps. Nous avons encore et toujours besoin de toi. Tonton, je te dis et nous te disons tous un dernier au revoir !

Bernard PECCABIN



Voir aussi les pages suivantes :
à 10 ans
à la fête de la St Mémoire
la famille au grand complet
Irène et Robert
le Chabrol
passage du boulanger