Si vous arrivez directement sur cette page, pour ouvrir le site principal, cliquez ici ! 

pour revenir au menu, réduire ou fermer la page







hancelade fut fondé par l'abbé Foucault, chassé de l'abbaye de Cellefrouin vers 1120. À cette époque, le pape Urbain II obligea les moines de Cellefrouin à quitter leur règle de St Augustin (qu'on pourrait résumer ainsi : prier Dieu et servir ensemble, de l'amour découlant la morale) pour suivre la règle des Bénédictins (prier et travailler), ce à quoi l'abbé Foucault s'opposa jusqu'à fuir, devenant ermites en ce lieu de Fons Cancellatus, nom d'une source protégée par une grille à proximité de laquelle il planta sa cabane de branchages.
(Cette source se situe à l'emplacement actuel d'une stèle à la mémoire de Alain de Solminihac, en bord de route.)

Rejoint par d'autres moines, le groupe s'organise en communauté.
En 1128, le premier abbé, Gérard de Montlava est béni par l'évêque de Périgueux, Guillaume d'Auberoche et en 1133, les moines choisissent la règle de St Augustin, rejoignant ainsi la congrégation des Chanoines de Saint Augustin.

Dès 1129, ils décident de construire un monastère. La tradition rapporte qu'en 1133, la sainte maison est esquissée. Il est permis de penser que l'église de ce premier monastère n'était que commencée, car sa construction a dû demander plus de quatre ans de travail et d'ailleurs son style évoque plutôt le milieu du XIIème siècle. Quoi qu'il en soit, les nouveaux religieux bâtirent un couvent protégé par une enceinte, puis une petite église paroissiale ; celle qui existe encore, et que consacra Raymond de Mareuil le 12 octobre 1147, en même temps que l'église abbatiale, celle-ci sous les vocables de la Vierge et de sainte Madeleine. On peut donc admettre qu'à cette date, l'église monastique était, sinon achevée, du moins très avancée.
Les limites actuelles de l'abbaye semblent être, en gros celles de l'origine.

es libéralités s'exercèrent, suivant la coutume, pour assurer la vie monastique. Des évêques, puis, encouragés par ces exemples épiscopaux, des seigneurs, dotèrent l'abbaye de terres, de forêts, d'églises...
Geoffroi de Cauzé y ajouta, vers 1140, le lieu de Merlande où fut aussitôt bâtie une chapelle assise sur une source, agrandie presqu'immédiatement par un prieuré formant un centre de recueillement et d'agriculture.
Raymond de Mareuil donna de son côté en 1148, non seulement les revenus de trois églises, mais un fragment de la vraie Croix !
Mais dès le début du XIVème siècle, le père intendant de l'abbaye a bien du mal à équilibrer son budget. L'abbaye vend alors quelques-uns de ses bénéfices et se met sous la protection du cardinal Élie de Talleyrand. En 1360, l'abbaye compte 22 religieux et reçoit du cardinal Élie de Talleyrand une dotation de 3800 florins d'or pour 38 nouveaux chanoines.

as ! une rude époque commence, celle des guerres anglaises, qui ne respecteront rien... Les Anglais boutent les religieux hors du monastère pour y loger une garnison car ils occupent Périgueux de 1360 à 1367. Devenue un château-fort, l'abbaye subit les hasards de la guerre. Tant et si bien que Du Guesclin, lors de son retour d'Espagne, monté sur le donjon de la Rolphie, aperçoit la bannière léopardée flottant sur ce qui restait du clocher de Chancelade. Et d'attaquer messieurs les Anglais, de pourfendre leur capitaine et de reconquérir l'abbaye...
Mais après son départ, l'Anglais reviendra et y restera jusqu'au XVème siècle...

e n'est que vers 1440 que la communauté se reconstitua en se mettant sous la protection de Arnaud de Bourdeille.
Un grand abbé commendataire, le seul qu'eut Chancelade, Geoffroy de Pompadour, permit à l'abbaye de reprendre vie.
Ce ne fut pas pour longtemps, car vinrent alors les guerres de religion qui furent atroces dans tout le Périgord. En 1575, l'année de la prise de Périgueux par les Huguenots, Langoiran s'empara de l'abbaye, la pilla, l'incendia et passa quelques moines au fil de l'épée...
De l'église, il ne restera que la croisée du transept avec la coupole et le clocher. La voûte de la nef et le chœur roman sont détruits.

ant de ruines accumulées ne pouvaient être relevées que par un très grand abbé, autrement dit par un "saint". Ce fut Alain de Solminihac, né en 1593 au château de Beley, à St Aquilin, à quelques lieues de Chancelade et qui sera dûment coiffé en Sorbonne du bonnet de docteur et viendra en toute humilité recevoir la tonsure monastique à Chancelade en 1618.
C'est en 1614 qu'il est pourvu de cette abbaye par décision de son oncle. Et les religieux ne sont alors plus que quatre...

Moine, puis très vite abbé du monastère, c'est en 1622 qu'il reçut la bénédiction abbatiale en la cathédrale Saint Front des mains de Monseigneur de la Béraudière, il releva les ruines, rétablit la discipline, rebâtit l'église à demi-abattue (la surélévation datant de cette époque est tout à fait visible), reconstruisit le cloître, les logis, les communs. En même temps, besogne plus difficile encore, il réforma l'abbaye, la repeupla de jeunes moines zélés et fervents.
Il obtint du Roi Louis XIII, au mois de novembre 1629, que le chapitre élirait trois sujets, parmi lesquels le Roi choisirait l'abbé.
Les monastères de Sablonceaux (diocèse de Saintes), de Verteuil (diocèse de Bordeaux), d'Aubrac (diocèse de Rodez), Saint Cyprien (diocèse de Sarlat) et de Cahors adoptèrent la réforme de Alain de Solminihac et formèrent une congrégation dont l'abbaye Notre-Dame de Chancelade était la tête...

Alain de Solminihac sera abbé de Chancelade de 1622 à 1659, date de sa mort.

                                
Un différend majeur opposa Alain de Solminihac à la Congrégation de France, les Génovéfains, congrégation fondée par le Cardinal de la Rochefoucauld, abbé commendataire de l'Abbaye Ste Geneviève à Paris. En 1635, on interdit à Alain de Solminihac d'étendre sa réforme. Chancelade ne fut pas, pourtant, agrégé à la Congrégation de France mais obtint l'autorisation d'exister comme congrégation indépendante, à la condition de ne pas chercher à vouloir agréger d'autres abbayes, hormis celles qui l'étaient déjà...

Le 17 juin 1636, Alain de Solminihac fut choisi et nommé par le pape Léon XIII pour occuper le siège épiscopal de Cahors... Il s'y installa, devenant le 67e évêque de Cahors, mais revint en 1638 pour consacrer l'église de Chancelade dont il achevait la restauration.
Son corps repose en la cathédrale de Cahors et il fut béatifié le 4 octobre 1981 par Jean-Paul II.

Jusqu'en 1790, l'abbaye coula, de nouveau, quelques années de piété et de foi.

e grands abbés marquèrent Chancelade de leur personnalité au XVIIème et XVIIIème siècle parmi lesquels l'abbé Gros de Beler qui orienta résolument ses religieux vers les études. La bibliothèque s'enrichit alors. Cartulaires, chartes et 4 000 livres s'y accumulent. En fait, le siècle des Lumières connut à Chancelade une sorte d'école historique. Les religieux recopiaient des manuscrits, déchiffraient des chartes, classaient des textes, consultaient des ouvrages rares, organisaient un travail collectif. Le Révérand Père Prunis avait une sorte de flair pour dénicher de précieuses paperasses : c'est lui qui mit la main sur le journal de voyage de Montaigne, enfermé dans une vieille malle dans la tour de la librairie et qui fut édité à Rome en 1774.
Il y eut des noms tels que Nicolas Baudeau, Guillaume-Vivien Leydet, Dulaurens de Reyrac ou encore Teyssandier, et bien d'autres qui, à des titres divers, ont profondément marqué leur temps. On leur doit surtout d'avoir amassé, sous forme de copies ou d'originaux, un très grand volume de chartes qui devaient leur servir à écrire une histoire de la province Périgord, laquelle ne fut jamais écrite...

Ajoutons que l'esprit scientifique, au sens large du mot, régnait à Chancelade qui possédait alors une machine électrique et qui avait souscrit à l' Encylopédie de Diderot !


Chanoine de Chancelade au XVIIIème siècle.
es abbés régnèrent, en moyenne, plus de vingt ans chacun, ce qui constituait un gage de continuité et de stabilité. L'abbaye abritait alors 20 à 40 religieux.
Mais le 32ème et dernier abbé, le père Penchenat, dut subir la terrible loi du 13 février 1790 qui supprimait les ordres religueux !
On jeta à l'encan les terres et les masures, les logis et les meubles, non sans avoir pillé auparavant ; on fondit les cloches ; on brûla des archives, y compris le cartulaire, mais la Révolution ne put tout détruire : nombre de documents furent, heureusement, inventoriés et placés sous séquestre pour être vendus à ce qui est devenue notre Bibliothèque Nationale où, rassemblés sous 183 très gros volumes, ils constituent aujourd'hui une masse incontournable pour quiconque veut écrire sur le Périgord. Plusieurs centaines d'ouvrages de la Bibliothèque se trouvent à la bibliothèque municipale de Périgueux dont une copie du fameux cartulaire réédité récemment...

Ainsi disparut, dans le désordre et le tumulte de la Révolution, cette abbaye qui, dès le XIIème siècle, avec quelques éclipses, avait été une sorte de pôle spirituel et intellectuel pour Périgueux et pour le Périgord tout entier.

Vous avez dit "disparut" ?


Cliquez pour agrandir !
        

Au début du XIXème siècle, l'église abbatiale deviendra église paroissiale.
Entre 1909 et 1942, une partie des bâtiments sera classée.
À partir de 1955, sous l'impulsion des propriétaires des lieux et du Père Mazeau, curé de la paroisse de 1965 à 1992, les bâtiments renaîtront...
Le 4 octobre 1981, le pape Jean-Paul II procèdera à la béatification de Alain de Solminihac.
Et en 1998, une communauté de Chanoines Réguliers de Saint Augustins se réinstallera à Chancelade et se verra confié, en 2004, le Logis de l'Abbé et son parc pour y développer un centre spirituel... renouant ainsi le fil coupé 200 ans auparvant...

sources : Jean SECRET, Bernard REVIRIEGO, diverses archives...


Dans l'église, propriété communale, vous pourrez admirer une peinture* du XVIIème siècle : le « Christ aux outrages » attribuée longtemps à de La Tour et maintenant au peintre hollandais Gerrit von Honthorst, le peintre de la nuit, à moins que ne soit le produit d'un élève de son atelier ou encore une copie plus tardive, œuvre d'une main inconnue...
Ce tableau aurait été donné à Alain de Solminihac par le pape Léon XIII...


* L'original est momentanément à la restauration. Une copie est exposée...




pour revenir au menu, réduire ou fermer la page