C'est, en somme, l'amant en titre de la terre. Il l'étreint, l'entretient, se penche sur son corps dénudé qu'il revêt de fleurs, de moissons d'or ; il uvre sans savoir quel sera son salaire. Sans jamais se lasser, depuis des millénaires, il fait naître la vie, en échec à la mort. Avec le plan divin, il est en plein accord, qui voulait la nature et l'homme solidaires. Fort de sa mission, il n'a rien pollué en son jardin d'éden et s'est évertué à ne point trahir la condition humaine. Il n'est pas emmuré dans le confort, traqué par tant de médias, le stress, tel un drogué ; rien ne masque le ciel, au-dessus de ses plaines. Il fut de ses chemins la Parque inexorable, Car sa faux frappait ras, mais surtout fréquemment, L'herbe folle affluant sur chaque accotement ; De leur bonne tenue, il se sentait comptable. Aucun déchet qui fasse un effet déplorable Ne traînait nulle part ; au moindre encombrement Il intervenait vite, ayant l'il constamment Ouvert sur son secteur toujours irréprochable. Dehors, par tous les temps, il colmatait les trous, Répandait du gravier, concassait des cailloux, Curait les caniveaux, aplanissait l'ornière. Oeuvrer à ciel ouvert trouva son plein accord Quand, jeune adolescent, il choisit sa carrière Et voua son effort aux passants de tout bord. C'est l'heure où l'on s'assied sous la lampe allumée, Tous les devoirs remplis et la tâche assumée, Libre de s'évader dans l'espace et le temps, Et de lâcher la bride à ses rêves latents. C'est l'heure où, de l'oubli, remonte à la surface Un grand amour perdu mais encore vivace Parce qu'on est, dès lors, demeuré sur sa faim Et qu'on la trompe avec quelque insipide pain. C'est l'heure où l'on se sent en grâce avec soi-même ; Or ce vague avant-goût d'un bien-être suprême Fait renaître en l'esprit l'espoir universel D'un ciel pour les élus, d'un bonheur éternel.
Finalement, ce qui, tout au long de ma vie, aura vraiment compté c'est d'avoir partagé, un temps plus ou moins long, l'amour, la sympathie ou l'amitié d'un être et d'avoir engagé, ce faisant chaque fois, le meilleur de moi-même. C'était comme une source affleurant au désert, la pâque inespérée offerte en plein carême, succédant au pain sec la grâce d'un dessert. Qu'il fait bon retrouver, jalonnant la mémoire, ces chaudes oasis, ces plages de répit en leur douce lumière, ah ! surtout par nuit noire quand, tous espoirs éteints, on se croirait maudit. De notre attachement pour toute créature naît un bonheur ; le reste est divertissement, course au profit ou dur labeur qui défigure l'humain sevré d'un plus tendre investissement. Par ailleurs, un site entièrement consacré à l'activité d'édition de l'atelier est désormais consultable sur : www.decal-age-productions.com Suzanne JARRE, née CHARVET, est décédée au soir du 11 septembre 2008,dans sa 99ème année... Retirée aux basses Veyrinas, son lieu de recueillement comme elle disait, ses dernières années furent un incessant questionnement sur le sens de l'homme, de la souffrance, du mal, de Dieu... Ainsi ce poème, tiré de son ouvrage "Le temps d'un éclair" : Pourvu que l'au-delà vaille mieux qu'ici-bas, sinon à quoi bon sert de naître disparaître et renaître, de quel nouvel aspect doté, pour une éternité qui risque d'être monotone, contemplative, atone. En attendant, buvons le vin ; tout au long du chemin, chantons, cueillons la moindre rose offerte, à peine éclose. Que toujours notre dignité vainque l'adversité. C'est la grandeur humaine de savoir supporter ses chaînes. ¸,ø¤º°`°º¤ø,¸ ¸,ø¤º°`°º¤ø,¸ ¸,ø¤º°`°º¤ø,¸ |