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         C'était il y a cinquante ans...
Accrochée au sommet du coteau, dominant un bois clairesemé de pins, la bâtisse bourgeoise flanquée de ses deux pigeonniers géants, tels deux contreforts comme pour l'empêcher de glisser...
En contre-bas, à portée de flèche, le vallon tranquille où serpente un Got encaissé, irriguant les aulnes, bosquets sacrés des druides, arbres de la mort chez les Grecs et les Romains (son bois est imputrescible) et que l'on appelait ici le merisier des pauvres...
Et le chemin blanc, un peu à l'écart des crus, signe la main de l'homme en ce lieu retiré...
Tout est calme...
Le bois est coupé et le bûcheron se repose...
Tout semble dormir...mais le printemps n'est plus loin !
Tout dort ? Peut-être pas...



         Là-bas, sans bruit mais pas sans effort, le métayer écarte son fumier, avec application...
Mètre par mètre, au rythme de ses bras noueux, il nourrit consciencieusement sa terre.
Il aura peiné pour porter chaque tas à la brouette, peiné pour écarter chaque fourchetée, peiné pour un sol durable, comme nous dirions aujourd'hui, du haut de notre science dominante...
Sagesse perdue dans les puits sans fond de nos égos démesurés...
Vous avez dit Sommet de Copenhague ?



         Au cœur de ce domaine, le Château, davantage une grosse bâtisse trapue qu'un véritable château qui ne tient probablement son titre qu'à son ancienneté et à son lien avec l'histoire des Templiers des Andrivaux, le bourg non loin de là et qui fut une commune, commune des Andrivaux-Merlande, jusqu'en 1809, date à laquelle elle fut rattachée à Chancelade.
Château peut-être aussi par le rang noble de ses occupants d'antan...
À l'origine, une bâtisse sans étage qui a été surélevée en 1824 et couverte d'ardoise à ce moment-là : l'ardoise étant alors un signe de noblesse... On retrouve, en toiture, la charpente en chêne d'origine, taillée à la hache, la charpente inférieure étant en résineux (probablement du mélèze du Massif Central), délignée à la scie. La date de cette grosse restauration est attestée sur un linteau de l'étage. Etonnemment, la même date se retrouve gravée sur une pierre, à la cave.

         Les Brunies, orthographié aussi Brunis, appartenait en effet aux Dalesme, sans doute d'Alesmes, qui seraient de Bretagne et c'est Marie Dalesme, veuve du Chazeau, qui vendit le bien à François de Glane, officier de santé, maître chirurgien à Périgueux, mort en 1823. Cet acte du 19 pluviôse an 2 (7 février 1794) a été enregistré au bureau des hypothèques de Périgueux le 5 frimaire an 9 (26 novembre 1801).
François de Glane était marié à Marie Brou de la Geneste (1753-1821). Peut-on faire le lien avec une autre maison noble du village, Le Genest, sans connaître pour autant la nature de ce lien ? ...

         La propriété passa à la fille de ce couple, Magdeleine Cécile Deglane (1783-1849), épouse de Pierre Basbayon du Maine (1776-1849), procureur royal, avoué au tribunal civil de Périgueux, décoré du Lis en 1814.
Ce couple eut une fille, Marie Louise Basbayon du Maine (1811-1886), artiste peintre, et qui épousa en 1827 Armand baron Pinoteau (1803-1882), avocat, sous-préfet sous Louis-Philippe, membre du Comité de la rue de Poitiers sous la IIème république et représentant du maréchal Bugeaud dans cet organisme politique, duc d'Isly...
Armand baron Pinoteau était le fils du général baron Pierre Armand Pinoteau.

         Le bien se transmit à son fils, Alphonse baron Pinoteau (1828-1909), commandant d'état-major, officier de la Légion d'honneur, puis au fils de ce dernier, Maurice baron Pinoteau (1859-1949), ingénieur civil sorti de l'École centrale des Arts et Manufactures qui s'occupa beaucoup des Brunies et y installa le fameux "bélier hydraulique" qui permettait de remonter quotidiennement 3000 litres d'eau du Got jusqu'au château...

         La fille de ce dernier, Cécile Pinoteau (1895-1974) fut la dernière propriétaire des Brunies de la famille. Elle épousa, en 1922, Jean de Rivasson (1891-1955) et vendit donc la propriété des Brunies à la famille Monzies, en 1957.
M. Monzies était le fils de Louis Monzies (1849-1930), né à Montauban excellent dessinateur, spécialisé dans la gravure à l'eau forte pour laquelle il obtint le Prix de Rome.
Voir la page Michel Pasqual.

         Un mot sur la culture de la vigne aux Brunies...
La fin du XIXème et le début du XXème voient l'apogée de cette culture que le phyloxéra décimera. On se rappelle que ce parasite vivait sur des plants de vigne résistants, en Amérique du nord et c’est l’introduction en Europe de boutures de vigne américaine qui a permis son apparition sur le sol européen. La faible résistance des plants européens a tout naturellement conduit à sa prolifération. Mais par le greffage d’espèces européennes sur des porte-greffes américains, donc naturellement résistants à ce parasite, la prolifération fut endiguée. Cependant, dans certaines régions comme ici, à la Chapelle Gonaguet, la vigne fut petit à petit délaissée. Les dernières vignifications datent de la fin des années 20 (1927 ?). Il y a eu jusqu'à 15 métayers et ouvriers au château, à la fin du XIXème siècle...
M. Monzies dit avoir retrouvé un foudre de 1100 litres, fabriqué à Carcassonne et signé. C'est dire l'importance de la vigne à l'époque.


La cour du Château, en 1971

         François Monzies, héritier du bien de par son père, deviendra conseiller municipal du Dr Rousseau de 1971 à 1993. Il morcellera sa propriété, ouvrant les Brunies à un urbanisme quelque peu anarchique qui vit "fleurir", sur tout le coteau du vallon du Got, quelques dizaines de nouvelles habitations... Aucun plan d'aménagement d'ensemble ne fut établi à l'époque, ce qui entraîna quelques "désordres" dans le paysage...


vue générale, en hiver 2008

Le château sera vendu, en décembre 2008, à Patrick Jourdin lequel envisage, avec courage, une restauration qui s'impose...

Quelques photos anciennes...

Tableau de Lucien Delaunay (1847-1922)


Armes de la famille Pinoteau




Sources :
         Notes de Hervé baron Pinoteau, petit-fils de Maurice baron Pinoteau, historien, chevalier de la Légion d'honneur, membre de l'Académie internationale d'héraldique fondée en 1949, ancien secrétaire général et vice-président de cette institution entre 1964 et 2007, il est aussi membre du comité d'honneur de la Société française d'héraldique et de sigillographie, 2e vice-président du conseil d'administration de la Société des amis du Musée de la Légion d'honneur et des ordres de chevalerie, membre de la Société de l'histoire de France et membre résidant de la Société nationale des Antiquaires de France.
         Auteur en héraldique et vexillologie (science des drapeaux), il est également grand connaisseur de l'étude de la symbolique de l'État français à travers ses divers régimes et dynasties. Il a fait le drapeau et les armes de la région Pays de la Loire. Les armes de sa famille datent de son ancêtre, le premier baron Pinoteau (1815), qui portent au franc-quartier senestre la marque des barons militaires de l'Empire.


Tous mes remerciements à cet auteur pour son accueil et son aide précieuse.
Le webmaster du site


Voir aussi le site associatif du village de la Chapelle Gonaguet.